Bonjour à tous,
Après Vanessa Valence et Raphaël Ferret c'est au tour de Guillaume Cramoisan d'être interviewé. Je remercie bien évidemment l'acteur d'avoir utilisé son temps pour nous répondre et je remercié également
Mélodie d'être déplacée jusqu'à Paris pour avoir réalisé cette interview. Petit rappel, Guillaume Cramoisan incarnait le Commandant Mathieu Perac dans la saison 1 et 2 de Profilage sur TF1.
Voici l'interview (questions sur profilage) :
Gardes-tu de bons souvenirs du tournage ? Si oui, peux-tu nous en faire partager ?Oui, je garde plein de bons souvenirs du tournage, c’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles je suis parti. Les choses s’étaient super bien passées avec tout le monde. Après, en particulier, c’est très "private joke". Je me souviens de grands froids, ce sont des bons souvenirs maintenant mais avec Odile, on en a bien bavé. Le réalisateur ne voulait pas qu’on voit les saisons à l’image, donc quand tu as un petit blouson et une petite chemise et qu’il fait -10…
Dans la vraie vie, supporterais-tu une personne avec le caractère de Chloé ?Si, je pense. Elle est complètement atypique, singulière, mais c’est une vraie belle personne.
As-tu gardé des contacts avec tes anciens partenaires ?Oui, avec Odile notamment. On s’appelle assez régulièrement. Je vois Raphaël de temps en temps aussi, et c’est tout. Jean-Michel je ne l’ai pas vu, Vanessa, je ne l’ai pas vue. J’ai des contacts avec le staff maquillage, coiffure, des techniciens que je retrouve à travers d’autres tournages.
Raphael FERRET nous a dit que tu en avais marre depuis quelques temps déjà avant ton départ, pourquoi ?J’aspirais à raconter d’autres choses que d’être planté derrière des histoires de flic, des interrogatoires… Ce qui se passait en privé dans la vie de Pérac n’était pas super passionnant. Y’a eu une fenêtre un moment sur sa vie privée… Après, je suis allé demander s’il allait se passer d’autres choses un peu croustillantes pour lui et ils m’ont répondu que le maillon fort était le personnage d’Odile, que c’était écrit pour Odile, donc j’ai dit "Ok, je m’en vais". J’aurais pas été honnête… Si tu restes pour une question d’argent… j’avais profondément envie de raconter autre chose et après, peu importe ce que tu gagnes ou ce que tu ne gagnes pas. J’aurais fini par être désagréable, aigri et je ne voulais pas. En plus, ça fatigue beaucoup une série, beaucoup plus que ce que les gens peuvent penser. On ne fait pas les guignolos comme ça en arrivant sur le plateau, c’est des heures et des heures de tournage, on devait apprendre les textes le soir. Moi je veux bien me fatiguer, mais si en plus de ça, t’as pas de quoi manger derrière pour être content de ce que tu fais et t’éclater au moment où tu le fais, voilà. Si c’était pour accompagner Chloé dans toutes ses trouvailles… C’était marrant, je l’ai fait et j’ai essayé d’apporter ce que j’avais à apporter, mais je ne pouvais continuer dans un cycle comme celui-ci.
Si on te demandait de refaire une petite apparition dans PROFILAGE, le temps d'un ou plusieurs épisodes, tu accepterais ?Ben c’est mal barré déjà, parce qu’il faudrait la trouver, l’apparition (sourire). Je ne sais pas, ça dépendrait de ce qu’il y a à faire encore une fois, de… Et puis ce qui est fini est fini.
Si tu n'étais pas parti, avais-tu des idées pour faire évoluer ton personnage différemment de celles des scénaristes ?J’avais pas forcément des idées mais j’aurais aimé pouvoir en discuter avec eux, avec Odile. Les deux comédiens qu’on était s’étaient trouvés très rapidement et se répondaient instinctivement sans rien avoir préparé. Y’a des tas de trucs la première saison qui ne sont pas écrits et qu’on a trouvé en jouant parce qu’Odile, c’est une actrice qui écoute le partenaire avec qui elle joue et qui rebondit très facilement. Donc c’était super agréable de s’inventer des espaces qui n’étaient pas écrits. Si on avait pu continuer comme ça, en sorte de ping-pong assez rigolo, sur nos deux natures très différentes, pourquoi pas, mais ce n’était pas le cas, et je sentais glisser la chose vers un truc bien carré, bien préparé.
Une autre fin pour le Commandant PÉRAC n'était-elle pas envisageable? Pourquoi avoir fait mourir le personnage au lieu de le faire muter par exemple ?Ils ne l’ont pas fait mourir parce que je crois qu’ils ne m’ont pas cru jusqu’au bout par rapport au fait que j’allais quitter la série. Et sur les dernières images, je suis vivant. Ils se sont laissé un point d’interrogation scénaristique, une possible réapparition. Mais après, le fait est, c’est qu’il était dans le coma et qu’il n’est pas revenu, mais il aurait pu revenir.
As-tu acheté une télé ? Si oui, as-tu regardé la saison 3 ? Si oui, qu'en as-tu pensé ?J’en ai acheté une, parce que j’avais un petit qui grandissait, qui s’intéressait au foot, donc on en a pris une pour regarder quelques matchs de foot, quelques trucs, mais je ne suis pas télé du tout, et je n’ai pas suivi la saison 3.
As-tu participé au casting de ton remplaçant ?Ho non. A partir du moment où je suis parti, exit Guillaume Cramoisan. Je crois qu’ils ont été invités à un festival, je n’étais même-pas invité. Ça a été très mal vécu.
Ne regrettes-tu pas d'être parti de la série, alors qu'elle devient un succès ?Non, je suis même heureux d’être parti. Désolé pour tous les gens qui… Ça a été très dur parce que subitement, tu rentres dans une phase de décélération que je ne connaissais pas. Pendant un moment, tu travailles, tu travailles, tu ne sors plus, parce que c’est un rythme de sportif, quand tu as 120 jours de tournage, que tu es de tous les plans, toutes les séquences… Malgré tout, on est très entourés, les gens sont avec toi, sont très gentils… sont gentils pour que tout se passe bien sur le tournage aussi, mais bon, là je suis dur, il y avait des gens qui étaient profondément gentils. Et quand tu décides d’arrêter, tu fais machine arrière, et là, la phase de décélération était vraiment brutale. Parce qu’après, on ne veut plus de toi sur cette chaine-là, les autres chaines ça devient difficile aussi. Bon là, je tourne pour France 2 sur "Boulevard du Palais", donc les choses rentrent dans l’ordre, mais le fait d’aller sur TF1, les autres chaines pensent que tu n’aimes pas ce qu’ils sont en train de développer… Mais bon, non, je ne regrette pas d’être parti.
Questions sur la musique :A la fin de la saison 1, nous t'entendons chanter (ainsi que sur ton FB), aurons-nous la chance d'avoir d'autres interprétations ?J’adore trouver des petites chansons en fouillant sur ITunes, j’adore prendre ma guitare et essayer de voir comment s’est foutu, d’entendre des choses qui me plaisent et de les chanter après.
Toujours en rapport avec la chanson, dans une de tes anciennes interviews, tu disais que tu te sentais plus chanteur que comédien, as-tu changé d'avis depuis ?En fait, c’est un truc que je ne sais pas faire, je n’ai pas forcément d’inspiration instantanée pour imaginer une chanson, et ça m’énerve. Je préfère écouter une chanson qui va m’interpeler plutôt que de regarder un film. Je suis effectivement plus profondément comédien que chanteur, mais si j’avais eu à choisir, si j’avais eu plus de facilité pour écrire des textes, j’aurais bien aimé faire de la chanson (sourire).
Questions sur le tournage :Si une personne souhaitait devenir comédien mais était trop âgée pour faire les conservatoires, que lui conseillerais-tu ? Comment ? Quelle formation ?Je pense que toutes les clés sont en elle. Ca dépend de sa nature, de ce qu’elle dégage, ce dont elle a vraiment envie, de la façon dont elle s’y consacre, ce que les gens vont finir par lui trouver, son passé, ses fêlures, ses joies, ses peines… Pour les cours, je sais qu’il y a le studio théâtre d’Asnières. Il y a aussi un type qui m’a assez enchanté, qui s’appelle Claude Matthieu. J’ai été content de faire sa connaissance et d’apprendre qu’il y avait des cours comme ça à Paris. Mais après, c’est très vague de donner des conseils comme ça, tu peux encadrer des gens, donner ton avis, mais ça tient tellement à peu de choses, à plein de choses… on ne sait pas.
En tant que comédien, quelles sensations t'apporte le fait de pouvoir te glisser dans la peau d’un autre ?Ca dépend du personnage que t’as à jouer, et encore une fois, de l’espace qu’on te donne pour le faire. Tu peux avoir un personnage qui n’a pas vraiment grand-chose à jouer sur le papier, et si on te dit "fais-en quelque chose, je voudrais qu’il soit comme-ci, comme ça", tu finiras par y prendre du plaisir car tu auras une totale liberté. Il faut que ça reste un jeu. C’est comme les gamins, quand ils vont au bac-à-sable, ils ne réfléchissent pas 10 000 ans avant d’aller au parc. Et moi je me fais un peu cette réflexion là aussi, je veux que ça reste un bac-à-sable dans ma tête, ne pas me poser trop de questions, et avoir l’envie de s’inventer un autre personnage avec tout ce qu’il peut avoir de marrant, de triste, de curieux, de chiant...
Comment travailles-tu tes rôles ? Apprends-tu tes textes, seul, au calme, ou as-tu d’emblée besoin de regards extérieurs pour mieux façonner tes personnages et parfaire ton jeu ?Je les apprends au café. Je n’ai pas besoin d’un regard extérieur, parce que sinon on en finit plus. Et ensuite, je me les balance un peu partout, dans ma voiture, en marchant, en faisant une course, partout.
Quel type de rôle aimes-tu plus particulièrement ?(Rire) Encore une fois, ça dépend de l’histoire, de comment est foutu le projet du début à la fin. Si t’as un très beau rôle dans une histoire de merde, ça restera une histoire de merde. Si t’as un petit rôle dans une histoire sublime, le petit rôle va forcément prendre de la consistance. Après, si tu as les deux réunis, une belle histoire et un rôle qui t’amènent vraiment dans des trucs qui te plaisent… Si, j’aime des personnages un peu troubles, dont tu ne sais pas trop qui ils sont, des gens qui s’amusent un peu avec leurs sorts, avec la vie… c’est toujours plus amusant.
Quel est le rôle que tu as préféré interpréter et pourquoi ?Il y avait ce personnage dans "Engrenages", Benoît FAYE. Justement, c’était ce genre de type… Il a une espèce de côté ange, il sourit à tout le monde, il a une vraie gentillesse je pense, et puis après, il est pris dans un truc qui le dépasse, et il se débat comme il peut, comme un type blessé, qui souffre et qui est allé trop loin.
Il y a aussi "Le petit monde de Georges Brassens"… Quand tu as la chance qu’on te donne un rôle de travelo et que tu as trouvé sa respiration, sa démarche, sa façon de parler, alors là, c’est un boulevard qu’il y a devant toi, et tu peux aller partout, faire ce que tu veux. Quand tu as trouvé la sincérité et l’axe du personnage d’un travelo, c’est fantastique de liberté et de plaisir.
A quand ton retour à l'écran ? As-tu des projets en cours ?Il y a des petites choses qui vont passer ; le film au brésil, "Jusqu’au bout du monde", "Un crime oublié" pour France 3, là "Boulevard du palais", voilà, des petites choses qui finissent par arriver.
Questions sur le théâtre :
Comment ton retour au théâtre s'est-il passé ?Je tournais "Enquêtes réservées", et j’ai rencontré Julie Judd qui tournait. On a déjeuné ensemble, et je lui disais que par moment, j’avais envie d’avoir des choses jolies en bouche, des beaux textes. Et je sentais que le théâtre me manquait. J’avais envie de me refaire peur un peu, de prendre des risques.
Et quelques jours après son retour à Paris, le metteur en scène du "Plaisir" l’a appelée pour lui proposer de rejouer la pièce au théâtre de la pépinière. Il lui a demandé si elle avait des idées pour le rôle masculin de Montade. Elle a fait une liste de possibles Montade et j’étais dedans. Il avait demandé la même chose à Fanny Gilles (le deuxième personnage féminin ndlr) et j’étais sur sa liste aussi. J’ai passé une audition et voilà, de retour sur les planches.
Des tournées de théâtre en roulotte, tu en referais encore ?Je ne crois pas hélas. Ça a été tellement merveilleux qu’il ne faut pas y toucher je pense. Et puis, on a plus l’âge. Ce serait vouloir revivre quelque chose qui nous a appartenu, dans lequel on s’est senti bien, et refuser d’être là au moment présent. Je ne vois pas comment ça pourrait se refaire.
Qu’est-ce que la troupe du Phénix est devenue ?Il n’est pas dit qu’on ne refera pas quelque chose mais sous une forme différente, en allant directement dans des théâtres, ou en refaisant quelques places de village pour le fun, mais pour l’instant, elle est en sommeil. C’était vraiment une troupe de jeunesse qui a toujours grandi et fait les choses sans subvention, seulement avec l’envie des uns et des autres, avec la joie et l’insouciance de nos 25-30 ans.
Sur scène, au théâtre, quels instants vis-tu le plus intensément ? Juste avant le lever de rideau ? En cours de représentation, quand les spectateurs réagissent comme tu l’espérais ?... Ou lorsque les lumières se rallument et que la troupe au complet vient saluer sous les applaudissements ?Tous. J’aime bien avant, j’aime pendant, j’aime bien après. Tous.
A l’époque du "Petit Monde de Georges Brassens", en 2001, tu définissais le succès parisien de la Troupe du Phénix comme "un clin d’œil plein d’insolence". Ton côté "rebelle" est-il resté intact et influe-t-il sur tes choix actuels, professionnellement parlant ?Oui c’était un clin d’œil plein d’insolence. Parce que personne n’aurait misé un kopeck sur cette troupe-là. Et la Troupe du Phénix, c’était les chevaux, les roulottes… En apparence, on était une troupe de déconneurs, mais on travaillait comme des chiens aussi. Mais sans jamais se prendre au sérieux. Donc effectivement c’était plein d’insolence. Après, je ne sais pas si j’ai un côté rebelle ou pas. Je fais les choses instinctivement, comme elles me viennent. Quand je sens que je ne suis plus à ma place, que j’ai fait le tour, j’arrête, je m’en vais. Il n’y avait pas de mode rebelle, c’était l’époque jeunesse, mais, on s’en foutait je crois. Mais on travaillait dur. Je ne sais pas si ça correspond à un truc rebelle…
Questions diversesPour toi, quel est le rôle de l’artiste dans la société ?On permet peut-être à des gens de souffler un peu, de décompresser. Je me suis jamais posé véritablement la question. Je trouve ça super important qu’il y ait des artistes. Maintenant, il y a une chose que je regrette dans le métier de comédien, c’est qu’on voit de plus en plus de gens sous prétexte qu’ils sont célèbres alors qu’ils n’ont rien à voir avec le métier de comédien. Et ça me fait du mal parce que c’est dénigrer complètement cette passion-là, le travail que certains font, c’est dénigrer les gamins qui sont dans des cours de comédie et qui essaient de devenir comédiens. Je veux citer personne, mais il suffit que tu aies un peu talent en tant qu’animateur radio ou en tant que vedette d’émission de télé, et on va te dire "Viens, viens faire l’acteur, tu verras, c’est pas difficile". Donc à partir de là, le rôle de l’artiste, ou du moins de l’acteur est un peu mis entre parenthèses. Donc je ne sais pas trop à quoi on sert. Mais heureusement, il y a des gens qui sont capable de faire la différence, ils ne se font pas forcément prendre, et heureusement.
Pas fan de la ville (toujours trop pressé et stressé) tu as dit avoir quitté la capitale... Pourtant tu y joues au théâtre en ce moment… Es-tu de retour car finalement trop "addict" à PARIS ?On a déménagé dans le sud de la France, un peu au bout d’un chemin, mais oui, j’ai gardé un petit machin à Paris… Heureusement.
Fais-tu du sport régulièrement ? Si oui, quoi ?Oui, j’essaie de nager, de m’entretenir. Je courais beaucoup, avant d’avoir des gros soucis de dos.
Fin 2011, tu as participé, guitare sous le bras, à une rencontre avec les détenus de la maison d’arrêt d’Angoulême. Quels moments forts t'ont le plus marqué ?Alors ça, c’était quelque chose ! Ce n’est pas anodin ce genre de rencontres… donc tu cogites, tu te demandes ce que tu vas leur dire. Tout était fort… il avait fallu demander une autorisation pour la guitare… Ce jour-là, ils avaient réunis pour la première fois les hommes et les femmes et c’était super. Il y a eu quelques frictions chez les femmes. C’était curieux de voir le comportement des uns et des autres ; il y en avait qui restaient complètement dans le silence, qui regardaient tout, mais qui étaient peut-être les plus concernés, et puis il y en avait qui étaient dans l’outrance d’eux-mêmes, ils voulaient chanter toutes les chansons, répondre à toutes les questions… C’était vraiment bizarre de voir cette micro société.
Si tu étais temporairement privé de l’un de tes 5 sens (vue, ouïe, odorat, goût, toucher), lequel te ferait le plus cruellement défaut... et pourquoi ?C’est compliqué là… Si on t’enlève un des cinq, tu es un peu amputé. Si je devais choisir… La vue peut-être, mais les sensations du toucher c’est quand-même… C’est horrible comme question ! (rire)
Le temps d’un rêve, on te confie les clefs de la Ville de Paris avec carte blanche pour 10 jours. Que fais-tu de ce privilège ? (Qu’organiserais-tu pour améliorer la vie quotidienne à Paris ?)Il y a tellement à faire (rire)… On peut être tenté de répondre "On va sortir toutes les voitures" mais faudrait trouver un truc plus… Ça me ferait bien marrer, de voir les parisiens avec le sourire… Je trouve que c’est un truc qui manque profondément à Paris. Tu vois les gens qui sont terrés dans une peur de l’autre, une volonté d’afficher un visage méchant, parce qu’il y a de plus en plus de gens qui se transforment en cocotte-minute, et c’est vrai que c’est une sensation un peu… triste et pénible. Et je ne sais pas, si pendant 10 jours, les gens pouvaient juste avoir le sourire. Voilà, c’est complètement con, mais je voudrais bien voir ce que ça donne….